A THESSALONIQUE, UNE BIENNALE PUISSANCE 8

Publié le vendredi 30 novembre 2018

Le saut en valait la chandelle. A Thessalonique, la quatrième Biennale éclatée dans différents lieux de la ville réserve beaucoup de bonnes surprises. Jusqu’à la fin du mois.

Texte et photos par Pauline Simons

« Everywhere but now », tel est le mot d’ordre de la quatrième Biennale de Thessalonique. Comme si plus personne n’avait le choix. Ni en Grèce, ni ailleurs. Adelina von Fürstenberg, commissaire générale de l’évènement, a parfaitement réussi à donner matière à ce bel intitulé : elle a mis en lumière à la fois la complexité et les questionnements politiques, socio-économiques et religieux des artistes du bassin méditerranéen tout en jetant des ponts bien au-delà vers d’autres cultures et tribulations artistiques. Comme si, quelque soit la toile de fond, les artistes du monde entier tenaient le même fil rouge. On reconnaît ici la patte de la commissaire générale qui a quitté la direction du Magasin, centre d’art contemporain de Grenoble afin de fonder Art for the world, une ONG dont le but est de promouvoir les valeurs universelles à travers l’art contemporain.

Avec la distance que donne la photo, esthétiquement, le rapport est flagrant ! Les personnages désolés, agglutinés et uniformisés de The Prow l’oeuvre de Marta Dell Angelo font étrangement écho à l’ Anti-Apparatus de Maria Papadimitriou et à la Méditerranée, mer de verre ou se croisent aujourd’hui des clandestins, des anonymes, des hors la loi.Mais dans le plein comme le vide tout le monde est logé à la même enseigne.

Depuis l’automne dernier, autour des œuvres d’une cinquantaine d’artistes, l’art bruisse dans la ville entière : éclatée dans huit lieux, la biennale de Thessalonique fait tâche d’huile. Les approches sont toutefois différentes. Au musée archéologique et au musée de la culture byzantine, l’ art d’aujourd’hui vient se greffer aux collections du passé, au musée d’art macédonien d’art contemporain, Denys Zacharopoulos, son directeur, a choisi de prolonger l’ histoire en retournant aux sources. Au contraire, dans le Pavillon 6, le plus vaste espace de la Biennale, les œuvres d’aujourd’hui se répondent, s’interpellent, se complètent dans des faces à faces esthétiques ou idéologiques où  la peinture, à même de poursuivre elle aussi son histoire, ne fait pas figure de parent pauvre. On retrouve avec plaisir des pièces d’artistes internationaux -Marina Abramovic, Inci Eviner, Ghada Amer, Miltos Manetas, Apostolos Georgiou, Claire Fontaine, Los Carpinteros… et on découvre les œuvres de jeunes artistes grecs déjà croisés dans d’autres expositions Maria Tsagari, Panos Tsagaris, Bill Balaskas… Ceux- ci sont invités à participer à la première édition du prix de la jeune scène artistique méditerranéenne créé par Hyam en partenariat avec la Fondation Jean-Luc Lagardère et dédiée cette année à la Grèce.

4ème biennale de Thessalonique. Jusqu’au 31 janvier. www.thessalonikibiennale.gr

The Heart récente sculpture de Ghada Amer, l’égyptienne dont les ombres portées tirent l’histoire à l’extérieur de sa bulle face à une autre écriture aussi belle qu’intelligible (pour beaucoup d’entre nous), celle de la Written Room de Parastou Forouhar, l’iranienne. tout aussi inintelligible pour un européen qui elle aussi habille le dedans et le dehors.

 Toujours au Pavillon 6

ce tableau récent d’Apostolos Georgiou
ce « carnaval improvisé » de Marcello Maloberti
les tunnels de Cuba de Los Carpinteros
une fiction de l’Europe par Philip Rantzer
la migration, ses complaintes et ses femmes une vidéo d’Inci Eviner
juste un détail des précieux ananachronismes de Veronica Smirnoff
Dans l’une des salles du musée archéologique les sculptures de David Casini
The water Diviner, une vidéo de Sheba Chhachhi au Musée macédonien d’art contemporain : un retour aux sources poétique mais sans concession.